Un regard sur l’histoire de l’antitrust : le déchaînement des intérêts particuliers
Note économique / Juin 2005
«Le monde de l’antitrust rappelle celui d’Alice au pays des merveilles: l’existence de chaque chose semble acquise, et en même temps insaisissable. C’est un monde au sein duquel la concurrence est élevée au rang d’axiome fondamental et de principe directeur, mais où « l’excès » de concurrence est dénoncé comme « sauvage ». C’est un monde dans lequel des actes visant à limiter la concurrence sont qualifiés de criminels lorsqu’ils sont entrepris par des hommes d’affaire, et considérés comme « avisés » lorsqu’ils sont mis en oeuvre par le gouvernement. C’est un monde dans lequel la loi est si vague que les hommes d’affaire n’ont aucun moyen de savoir si telles ou telles actions seront déclarées illégales avant le verdict d’un juge, a posteriori. Vu la confusion, les contradictions et l’ergotage juridique qui caractérisent le domaine de l’antitrust, je propose que tout l’appareil de l’antitrust soit réexaminé. Il est nécessaire de porter son attention sur: (a) les origines historiques des lois antitrust, et (b) les théories économiques sur lesquelles ces lois sont fondées.»
Dans une large mesure, les controverses concernant la nature des politiques de l’Union européenne sont nourries par des contradictions entre l’usage des termes et leur véritable sens. La «libre concurrence» pourrait bien être un exemple typique de la façon dont le projet de Traité constitutionnel européen obscurcit et déforme le langage. Dans l’article I-3, au second paragraphe, on peut lire que «l’Union offre à ses citoyens (…) un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée». Qu’est ce que «non faussée» ajoute à «libre»? Cette expression ouvre une voie à la prétendue nécessité de l’intervention de l’État dans le marché par la législation antitrust.