Notes et baromètres

« Lutte contre la discrimination » en Europe : ne répétons pas l’erreur américaine

Note économique / Novembre 2009

Engagées dans une « lutte contre la discrimination », les instances européennes multiplient les réglementations visant à une « égalité de traitement » des personnes au sein de l’UE. Si de telles réglementations sont politiquement attrayantes, leurs effets économiques sont rarement pointés du doigt. Or, justement la lutte contre la discrimination a été identifiée comme l’une des causes ayant contribué à la crise immobilière et à l’imprudence généralisée qui ont posé les jalons de la récession actuelle.

Les pouvoirs publics européens sont en train de commettre une erreur de même nature. La législation antidiscrimination européenne handicape en effet la bonne gestion par les assureurs des aléas de la vie. Elle augmente les coûts et l’insécurité juridique pour ceux parmi eux qui voudraient proposer des tarifs et des polices d’assurance réalistes par rapport aux risques encourus, pénalisant in fine les consommateurs européens par une couverture moins efficace face à ces risques.

L’exemple des prêts hypothécaires américains

Le laxisme des institutions financières dans les critères d’octroi des prêts et la prise de risques inconsidérée ont joué un rôle largement reconnu dans le gonflement de la bulle immobilière et la crise économique actuelle. Or, la lutte anti-discrimination, menée aux États-Unis depuis plusieurs décennies, est l’un des facteurs ayant contribué au relâchement généralisé de ces critères[[Voir Stan Leibowitz, « Anatomy of a Train Wreck Causes of the Mortgage Meltdown », Independent Policy Report, Independent Institute, octobre 2008, disponible à:
http://www.independent.org/publications/policy_reports/detail.asp?type=full&id=30.]].

En effet, dès les années 1980 les banques ont été accusées de discrimination dans l’octroi de prêts hypothécaires à l’égard de certaines minorités. En 1989, une nouvelle législation les oblige alors à collecter et à diffuser des informations concernant l’origine raciale des emprunteurs. Une étude officielle de la Réserve fédérale de Boston conclut, en 1992, que la discrimination dans les prêts hypothécaires est systématique. Enfin en 1995, pour imposer une « égalité » de toute la population devant l’octroi de prêts hypothécaires, le Community Reinvestment Act – une législation datant de 1977 – est renforcé exigeant des banques, sous peine de sanctions, d’accorder des prêts sans distinction de traitement aux différentes minorités.

Il était incontestable que les dossiers de financement de certaines minorités étaient plus fréquemment rejetés. La première cause de refus n’était cependant pas une question de race ou d’appartenance à une minorité mais au fait que les individus concernés avaient en premier lieu des revenus plus faibles et présentaient un risque de défaut de remboursement plus important. « L’inégalité » de traitement était ainsi liée à d’autres facteurs qu’à une discrimination raciale ou ethnique du souscripteur. Cela n’empêcha pas les pouvoirs publics de faire pression sur les banques afin qu’elles relâchent leurs critères habituels dans l’octroi des prêts et permettent ainsi l’accession à la propriété à toutes les minorités.

Même si les banques avaient voulu rester prudentes en gérant correctement le risque de non-remboursement, elles risquaient d’être accusées de discrimination. Les établissements peu scrupuleux dans la gestion de ces risques – octroi de prêt sans critères de revenus, sans analyse de l’historique de crédit du souscripteur, et sans apport personnel de la part de ce dernier, etc. – se trouvaient, en revanche, protégés par la réglementation.

La réglementation incitait d’autant plus à la prise démesurée de risques que deux facteurs supplémentaires allaient dans le même sens. D’une part, deux organismes parapublics garantissaient les prêts de mauvaise qualité et collectivisaient ainsi les risques en cas de pertes sur les prêts immobiliers (la Federal National Mortgage Association, surnommée Fannie Mae, et la Federal Home Loan Mortgage Corporation, surnommée Freddie Mac). D’autre part, la banque centrale américaine maintenait un taux d’intérêt artificiellement bas – incitant l’ensemble des banques à prêter facilement – et jouait le rôle de prêteur de dernier ressort, susceptible de secourir les établissements en difficulté.

La réglementation anti-discrimination a ainsi contribué à détruire les critères d’octroi des prêts immobiliers qui servaient traditionnellement à la bonne gestion des risques. Tout ce processus a logiquement débouché sur des défauts de paiement à grande échelle et une faillite de facto des prêteurs que les pouvoirs publics – après avoir causé le problème – se sont alors empressés de sauver.

Un agenda européen « anti-discrimination » ambitieux

Dans la poursuite d’un agenda politique et social de même nature, les pouvoirs publics multiplient les réglementations anti-discrimination depuis quelques années en Europe.

Une directive de 2004 (Directive 2004/113/CE du Conseil du 13 décembre 2004), entrée en vigueur à la fin de 2007, a ainsi proscrit en principe « l’utilisation du sexe comme critère dans le calcul des primes et des prestations à des fins d’assurance et autres services financiers, dans tous les nouveaux contrats conclus après le 21 décembre 2007 »[[Voir le document « Principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes en dehors du marché du travail », disponible à : http://tinyurl.com/yjl3b2b. La directive a laissé aux États-membres l’option « d’autoriser des différences proportionnelles en matière de primes et de prestations pour les assurés » lorsque le sexe est jugé comme un facteur déterminant dans l’évaluation des risques, dont l’utilisation serait justifiée par des données actuarielles et statistiques que les pouvoirs publics estimeront suffisamment pertinentes et précises. Plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, ont exercé cette option.]]. La pratique consistant à répartir les femmes et les hommes dans des groupes distincts pour le calcul des primes est ainsi jugée « discriminatoire » par la Commission. Une telle décision a été prise en dépit de la reconnaissance explicite « du fait qu’ils n’encourent pas les mêmes risques » et que leur profil est donc différent.

Une nouvelle proposition de directive en cours prévoit d’aller plus loin. Elle vise en effet une « égalité de traitement » sans distinction de religion, de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle de la personne[[Voir la proposition de directive COM(2008) 426 final, disponible à : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2008:0426:FIN:FR:PDF. Les États-membres pourront autoriser des différences « proportionnées » de traitement quand l’âge ou l’handicap seraient jugés « déterminants » dans l’évaluation de risque sur la base de données actuarielles et statistiques estimées « précises et pertinentes » par les pouvoirs publics (voir l’article 2 (7)).]].

De telles législations seront cependant une source d’insécurité juridique pour le secteur de l’assurance qui sera particulièrement touché de par sa nature et ses spécificités. L’âge, le sexe, le handicap, etc. de l’assuré ont indéniablement un impact sur son profil de risque et sa gestion par les assureurs.

Différenciation et classification des risques au cœur du métier d’assurance

Face aux pertes liées aux aléas de la vie, les hommes ont depuis toujours cherché à se prémunir par divers moyens dont les contrats d’assurance.

Ainsi, qu’il s’agisse d’entreprises ou de simples particuliers, les Européens ont souscrit pour près de mille milliards d’euros de polices d’assurance en 2006 et le secteur européen de l’assurance occupe une place économique importante[[Source: « EU Financial Services : Insurance », Eurostat, 2008, disponible à : http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_OFFPUB/KS-SF-08-075/EN/KS-SF-08-075-EN.PDF.]]. En France, le budget moyen « assurances » d’un foyer (hors cotisations sociales obligatoires) est estimé à près de 2270 euros en 2007 (voir Tableau 1, page 3)[[Voir le Rapport 2009 sur l’Assurance et la Protection Sociale en Europe, Facts&Figures, 12 juin 2009, disponible à : http://www.lesechos.fr/medias/2009/0612//300355053.pdf. ]]. Plusieurs produits d’assurance parmi les plus onéreux qu’il achète – telle l’assurance automobile ou l’assurance santé – risquent d’être affectés par la nouvelle réglementation européenne.

Afin d’offrir cette protection contre les aléas de la vie, les assureurs utilisent plusieurs outils visant à une bonne gestion des risques. Ainsi, ils différencient, classifient et mutualisent les risques qui, selon leur expérience et les informations disponibles, leur paraissent suffisamment homogènes pour être regroupés. Le travail d’un assureur consiste principalement à identifier et à mutualiser, i.e. mettre ensemble, de tels risques, puis à appliquer des primes en fonction de la fréquence de manifestation du risque au sein de chaque groupe.

Les risques par exemple d’inondation près d’un fleuve ne sont pas les mêmes qu’à l’intérieur des terres. Les primes devraient par conséquent varier d’un endroit à l’autre. De même, en matière d’accidents de la route par exemple, les conducteurs de véhicules ne présentent pas tous le même profil de risque. Les primes peuvent donc logiquement varier en fonction de la puissance du véhicule, de l’endroit où il est régulièrement conduit (à la campagne ou en agglomération urbaine où le trafic est plus dense), ou de tout autre facteur que l’assureur trouvera pertinent[[Voir par exemple le document d’information « Comment sont établis les tarifs d’assurance automobile ? », Fédération française des sociétés d’assurance, août 2009, disponible à : http://www.ffsa.fr/WebFFSA/portailffsa.nsf/html/tarifsauto/$file/FP101aout09.pdf.]]. Parmi les critères de différentiation des risques, les caractéristiques personnelles de l’assuré peuvent naturellement jouer aussi un rôle. Les assureurs essaient ainsi de tenir compte de l’expérience au volant du conducteur et de sa façon de conduire, susceptible ou pas de causer un accident.

Dans un monde idéal où l’information serait parfaite, les assureurs n’auraient aucun problème pour déterminer les risques et les classifier. Dans le monde réel en revanche, l’information est toujours imparfaite et l’incertitude concernant l’avenir est toujours présente. Les assureurs n’ont pas tous les moyens possibles d’évaluer directement les risques liés aux facteurs personnels de l’assuré. Par exemple, dans le cas de l’assurance automobile, ils ne sont pas en mesure de savoir si un assuré en particulier est un conducteur prudent ou pas.

Les assureurs ne sont pour autant pas complètement démunis face à cette situation d’information incomplète. Par l’expérience passée (bien que pas toujours quantifiable), mais aussi par l’accumulation de données statistiques et par l’acquisition d’informations pertinentes, ils trouvent que certaines caractéristiques personnelles sont associées à une occurrence systématiquement plus fréquente du risque qu’ils désirent assurer[[Sur l’importance de ce processus d’inférence statistique et comment les dispositions anti-discrimination portent atteinte à son utilisation, voir Ben O’Neil, « The Antidiscrimination Paradigm : Irrational, Unjust, and Tyrannical », The Independent Review, vol. 13, numéro 4, printemps 2009, p. 533-534, disponible à : http://www.independent.org/publications/tir/article.asp?a=728. ]]. L’art d’assurer, c’est parvenir à constituer des groupes de risques aussi homogènes que possibles en fonction du profil de l’assuré.

L’expérience montre ainsi que les femmes représenteraient un moindre risque au volant[[Voir à cet égard par exemple « Private Motor Insurance by Age and Gender », Association of British Insurers, juin 2008, disponible à : http://www.abi.org.uk/Facts_and_Figures/44435.pdf. Les données montrent que les femmes représentent une part moins importante des réclamations que les hommes.]] et seraient moins sujettes à des maladies graves que les hommes[[Voir « CMI Data by age and gender: Critical illness insurance », juin 2008, disponible à : http://www.actuaries.org.uk/__data/assets/pdf_file/0020/134381/Gender_CI.pdf.]]. Elles seraient donc susceptibles, – quand la réglementation ne l’empêche pas – de bénéficier de primes d’assurance auto et d’assurance contre les maladies graves moins élevées[[Il s’agit d’une forme d’assurance qui prévoit le versement d’un montant forfaitaire si l’assuré(e) est atteint(e) d’une maladie grave telle que le cancer, une crise cardiaque, etc. (liste pouvant varier d’un assureur à un autre).]].

Tenir compte du sexe de l’assuré ou de tout autre paramètre, comme l’âge, permet aux assureurs de mieux appréhender indirectement les risques qu’ils veulent assurer. Les forcer à pratiquer les mêmes primes et les mêmes polices pour tous les assurés revient à considérer que les risques courus sont similaires alors qu’ils ne le sont justement pas. C’est une source de nombreuses distorsions sur le marché de l’assurance.

Flexibilité des produits d’assurance, essentielle pour la bonne gestion des risques

La libre différenciation des risques, des primes et des polices d’assurance joue un double rôle pour l’existence d’un secteur de l’assurance performant et viable. Toute réglementation anti-discrimination leur porte atteinte.

D’une part, une telle flexibilité permet de gérer le phénomène de sélection adverse, à savoir que par manque d’information, les assureurs courent toujours le danger d’attirer en priorité des personnes représentant des risques élevés. Si tel est le cas, le niveau des primes est insuffisant pour faire face à des aléas qui de facto ont été sous-estimés et la viabilité économique de l’assureur est tout simplement menacée. L’identification, la classification et la différenciation des risques et des primes par les assureurs sont donc primordiales. Le fait d’utiliser une tarification différentiée est un moyen de faire face à ce phénomène de sélection adverse. Les assurés représentant un profil de risque plus élevé paient logiquement des primes plus élevées pour le même niveau de couverture.

Le secteur de l’assurance doit aussi gérer le problème de hasard moral qui correspond au fait qu’une fois protégés contre un aléa, les assurés peuvent se permettre d’être moins prudents face à l’occurrence de cet aléa. Par exemple quand les automobilistes sont assurés « tous risques », ils sont moins incités à conduire prudemment et pourraient prendre davantage de risques au volant. Il s’ensuit que si l’assureur ne trouve pas des moyens de contrevenir à ce problème, le risque a plus de chance de se produire. L’existence de franchise par exemple dans les contrats d’assurance est un outil dont disposent les assureurs pour gérer le hasard moral.

Mais la flexibilité des tarifs et des produits d’assurance est là encore d’une importance capitale. Des pénalités (malus) plus sévères en cas d’accident provoqué par un jeune conducteur (par rapport au reste des automobilistes) pourraient ainsi inciter cette catégorie de conducteurs peu expérimentés à être davantage vigilants sur la route.

En présence de tarifs et de polices d’assurance uniformes, les « mauvais » risques et les comportements imprudents ont en revanche tendance à se multiplier parce qu’ils se trouvent subventionnés par les « bons » risques, i.e. ceux qui font les efforts pour les éviter et qui sont au contraire pénalisés.

Des primes calculées en fonction du profil du souscripteur sont un des outils indispensables aux assureurs pour faire face à ces deux phénomènes susceptibles de mettre en péril leur entreprise et avec elle, les protections offertes à leurs différents clients.

Une législation allant à l’encontre de la logique assurantielle

En apparence, les directives anti-discrimination européennes semblent reconnaître les spécificités de l’assurance et le fait qu’il existe des différences de traitement de la part des assureurs en fonction de caractéristiques personnelles (comme l’âge ou le handicap éventuel de la personne)[[Voir par exemple la considération (15) dans la directive COM (2008) 426, p. 15 : « Des facteurs actuariels et des facteurs de risque liés au handicap et à l’âge sont utilisés dans le cadre des services d’assurance, de banque et d’autres services financiers. Ces facteurs ne devraient pas être considérés comme des discriminations lorsqu’ils s’avèrent déterminants pour l’évaluation du risque. »]].

L’ensemble de cette nouvelle législation « anti-discrimination » entrave et dissuade pourtant considérablement l’utilisation d’une tarification différenciée.

Premièrement, la fixation de primes différenciées se trouve soumise à plusieurs conditions fixées par les pouvoirs publics. Par exemple, la directive permet au législateur de décider si un facteur comme le sexe, l’âge ou le handicap est « déterminant » ou pas. Ces critères seront arbitrairement imposés aux assureurs qui sont pourtant, à la différence des pouvoirs publics, les spécialistes de l’évaluation des risques. Une définition trop restrictive de ce qui sera jugé comme « déterminant » par les pouvoirs publics empêchera une gestion efficace des risques par les assureurs.

Quand ils sont soumis aux règles du marché (notamment le risque de faillite) ces derniers ont les incitations nécessaires pour utiliser les données statistiques et actuarielles les plus précises possibles et ainsi faire varier leurs tarifs. S’ils ne le font pas, ils créent une opportunité pour leurs concurrents de proposer des produits mieux ciblés, mieux tarifés et ainsi de leur prendre des parts de marché. Ce processus concurrentiel d’essais et d’erreurs de la part de l’ensemble des assureurs sur le marché est crucial pour découvrir et réactualiser en permanence les données et les informations nécessaires à l’évaluation la plus efficace possible des risques.

Cependant, l’intervention des pouvoirs publics portera inévitablement atteinte à ce processus concurrentiel. Car si les données présentées par un assureur ne sont pas jugées pertinentes par les pouvoirs publics, la nouvelle législation empêchera cet assureur de pratiquer des primes différenciées, au risque de déséquilibrer ses comptes.

Au lieu de rechercher et de collecter des informations qu’ils jugent – à leurs risques et périls – utiles dans leur gestion des risques, les assureurs seront incités à collecter et à publier des informations dans le seul but de se conformer aux exigences officielles et de montrer qu’ils ne discriminent pas, ce qui n’est pas leur métier.

Deuxièmement, la charge de la preuve est inversée. Les assureurs seront présumés « coupables » de discrimination s’ils ne pratiquent pas des primes uniformes. Les assureurs qui décideraient envers et contre tout de pratiquer des tarifs différenciés seront facilement attaquables devant les instances juridiques et devront supporter des coûts supplémentaires, même si in fine ils avaient de bonnes raisons de les pratiquer.

Les coûts liés à la mise en conformité avec la législation et à l’insécurité juridique qui en découlera limiteront considérablement, voire mettront fin aux pratiques de différenciation des tarifs à partir de critères objectifs (âge, sexe, etc.). Les entraves à la modulation des tarifs empêcheront les assureurs de faire correctement leur travail, en les empêchant de gérer efficacement les problèmes de sélection adverse et de hasard moral. Cela rendra le marché de l’assurance « défaillant ».

Le consommateur finira pénalisé

Une tarification unique ou une différentiation insuffisante des risques bénéficieront, certes, à court terme à ceux qui seront considérés comme des « victimes » de la discrimination et qui se retrouveront de facto subventionnés par la réglementation.

Mais une telle réforme pénalisera inévitablement le reste des souscripteurs d’assurances qui devront financer ces « subventions » par des primes ou des franchises plus élevées. Les conséquences de la réglementation « anti-discrimination » seront surtout ressenties par les groupes d’assurés qui, sans forcément être plus fortunés que ceux qu’ils « subventionnent », représentent des risques moindres.

Par exemple, en l’absence d’une distinction selon le sexe, les femmes pourraient être pénalisées en matière d’assurance automobile ou d’assurance contre les maladies graves. En matière d’assurance santé ou d’assurance vie/décès, des souscripteurs jeunes et en bonne santé seront amenés à subventionner les assurés plus âgés et généralement plus fortunés.

À plus long terme, les coûts liés à la mise en place et au respect de cet agenda social « anti-discrimination » et les défaillances du marché de l’assurance qu’ils occasionneront seront supportés par l’ensemble des consommateurs. Les assureurs étant dans l’incapacité de gérer convenablement les phénomènes de hasard moral et de sélection adverse, la prise inconsidérée de risques se trouvera encouragée par la réglementation. Cela renchérira le coût des polices d’assurance et risque même d’inciter les assureurs à ne plus proposer certains contrats. Les assurés en seront les grands perdants.

Conclusion

L’agenda social de lutte contre la discrimination pose des obstacles insurmontables à la bonne gestion des risques. L’expérience des prêts hypothécaires américains montre que le relâchement des critères d’octroi de prêts a généré des effets pervers massifs. Il a fragilisé les préteurs comme les emprunteurs, préparant ainsi le terrain à une crise financière mondiale.

En Europe, la montée en puissance des réglementations communautaires et nationales est de nature à induire des effets pernicieux de même nature, en empêchant les assureurs de faire leur métier. Comme aux États-Unis, il existe un risque que cet enchaînement, mal compris, soit aussi le prétexte à la mise en place d’autres réglementations, produisant des distorsions supplémentaires.

Ne répétons pas l’erreur américaine. Si les consommateurs veulent bénéficier d’une protection bien développée et efficace face aux aléas de la vie, il est primordial que le secteur de l’assurance privée échappe à la législation « anti-discrimination » européenne.

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