Oui monsieur Cameron, la compétition fiscale est aussi bonne pour vous !
Texte d’opinion publié le 28 juin 2012 sur 24hGold.
Lors du dernier G20, je n’ai pu m’empêcher de m’amuser des réactions épouvantées de nos hommes politiques français à la remarque particulièrement bien sentie du premier ministre anglais David Cameron. Celui-ci a déclaré qu’il déroulerait le tapis rouge pour les entreprises françaises souhaitant s’installer en Grande-Bretagne. Il évoquait alors un « sain esprit de compétition ».
Ironique à propos de la fiscalité française, il n’a pourtant pas fait preuve du même sens de l’humour quand Jimmy Carr, comédien britannique, se révéla utiliser un système lui permettant de diminuer de façon légale son niveau d’imposition. La concurrence fiscale ne serait-elle bonne que pour les autres ?
L’évasion fiscale, les paradis fiscaux ont mauvaise presse car ils sont immédiatement associés à l’idée de ces « riches » qui chercheraient à payer moins que leur dû à la société, à des parasites qui profiteraient des biens publics fournis par l’État sans passer au tiroir-caisse ou à des égoïstes qui refusent de partager avec les autres.
Comme souvent à propos de ces questions de société, les choses sont plus complexes qu’elles n’apparaissent au départ car l’évasion fiscale, c’est comme une bonne fessée. De temps, en, temps, ça remet les pendules à l’heure.
Car qui envisage une évasion, vit dans une prison. Qui rêve du paradis cherche sans doute à éviter l’enfer. Quelle prison ? Quel enfer ? Celui ou celle du citoyen qui juge que son fardeau fiscal est bien trop lourd et cherche à se protéger. Or, plus ce fardeau s’alourdit, plus ce besoin d’évasion concerne le plus grand nombre d’entre nous et plus il devient urgent de donner une bonne correction à des pouvoirs publics qui cherchent trop facilement à sonder la profondeur de la poche du contribuable.
Un constat s’impose tout d’abord. De même qu’il y a rarement de fumée sans feu, il n’y a aussi que rarement d’évasion sans raison. Or, justement, le niveau d’imposition des français comme de nombreux autres citoyens des pays développés est devenu au cours des années particulièrement lourd. Nous avons calculé avec Ernst & Young que le Français moyen devait travailler au moins jusqu’au 26 juillet pour s’acquitter de toutes ses charges fiscales.
Or, face à la crise des finances publiques, le nouveau président pense encore pouvoir en rajouter quelques couches avec une taxe sur les transactions financières, une autre de 75% sur les plus hauts revenus, etc.
Pour revenir à un déficit de 4,5% du PIB, le gouvernement doit trouver 7 à 10 milliards d’euros. Quoi de plus naturel que de recourir à la manne fiscale et de fustiger par la même occasion ceux qui seraient tenter d’y échapper.
Or, l’évasion fiscale d’un pays à un autre ou les niches fiscales au sein d’un même pays ne sont que des symptômes et des remèdes à des politiques fiscales confiscatoires, arbitraires et perçues comme de plus en plus injustes. Il est vrai qu’il n’est jamais agréable de se faire sanctionner mais l’évasion est la mesure du niveau de tolérance au fisc. Elle est sur le plan politique une limite à la tendance expansionniste de l’État.
De plus, sur le plan économique, c’est un moyen de promouvoir l’efficacité. Les moyens privés qui peuvent échapper à l’impôt, peuvent servir de matière à des investissements, créer des emplois et satisfaire des besoins.
Pour les contribuables, c’est la garantie d’une diversité de choix et d’une plus grande protection de leur propriété. Or ces contribuables-riches, sauf à avoir « volé » leur richesse ne le sont pas devenus par hasard. S’ils le sont, c’est qu’ils ont largement contribué au bien-être de leurs compatriotes via leur activité d’entrepreneur, comédien, et créateur de richesses en tout genre. Il est caricatural de croire qu’ils gardent tout sans rien donner. On est loin du compte.
Que les gouvernants trouvent particulièrement inconfortable de voir leurs ressources baisser sous l’effet d’une plus grande évasion fiscale. Quoi de plus normal. De même, quoi de plus heureux pour Cameron que de voir son homologue français nous mettre des boulets aux pieds dont il pourra bénéficier.
Les contribuables devraient quant à eux se réjouir de ce qu’il existe encore suffisamment de liberté et de concurrence fiscale pour pouvoir sanctionner des États devenus trop gourmands, qui sapent les bases de la société : la motivation au travail, l’endurance, l’efficacité, la productivité et in fine le bien-être.
Cécile Philippe est directrice générale de l’Institut économique Molinari.