Comment réduire le chômage des jeunes
Texte d’opinion publié en exclusivité sur le site de l’Institut économique Molinari.
Le Président Mitterrand déclarait « avoir tout fait pour vaincre le chômage ». Aujourd’hui, son successeur François Hollande, en prétendant alléger le code du travail, montre qu’il reste beaucoup à faire. Mais en s’interdisant de toucher aux 35 heures, au code du travail et au SMIC, il s’interdit de prendre des mesures vraiment efficaces. Telle que le serait l’institution d’un salaire minimum réduit à l’usage des jeunes (à défaut de supprimer totalement le SMIC).
En France, le chômage est d’autant plus insupportable qu’il affecte de façon disproportionnée les jeunes de moins de vingt-cinq ans : en décembre 2015 25,9% d’entre eux (soit 22% du nombre total de chômeurs) n’avaient pas de travail. Une telle situation est grave car être chômeur à 25 ans signifie risquer de ne jamais trouver un emploi durable.
Bien entendu, le gouvernement actuel comme ceux qui l’ont précédé, conscients du problème, ont tenté de le résoudre. Les solutions apportées ont consisté essentiellement à baisser les charges des entreprises, à aider financièrement des programmes de formation (destinés en réalité à sortir provisoirement des individus des statistiques du chômage) ou des embauches ciblées. Coûteuses pour le budget de l’État de telles pseudo-solutions ne peuvent avoir que des effets limités, voire nuls à terme puisqu’elles ne touchent pas aux causes fondamentales du chômage.
En effet, pour qu’une entreprise embauche un employé, il faut que celui-ci lui rapporte plus qu’il ne lui coûte. S’il n’a ni formation ni expérience du monde du travail son apport ne peut être que faible, voire inexistant. Dans ces conditions une entreprise préférerait, quitte à payer le SMIC, à embaucher une personne plus âgée ayant déjà travaillé. Ou à avoir recours à de nouvelles technologies (caisses automatiques remplaçant les caissiers/caissières dans les supermarchés).
Dans une économie dans laquelle le SMIC est fixé à un niveau élevé (ce qui est le cas de la France où il est égal à 60% du salaire médian), l’institution d’un salaire minimum jeune inférieur au SMIC adulte actuel réduirait le chômage des jeunes en égalant coût et avantage des recrutements.
Le bienfondé de cette solution est démontré par les faits. Dans une économie où un salaire jeune existe, ses effets sont sans ambiguïté. Aux Pays-Bas, où des rémunérations inférieures au salaire minimum national sont autorisées, ce salaire minimum jeune croît avec l’âge allant de 20% de sa valeur « adulte » à 15 ans à 80% à 23 ans le chômage des moins de vingt-cinq ans n’a été en décembre 2015 que de 11,2% soit au même niveau que le chômage chez les personnes plus âgées.
Malheureusement, l’opposition de la gauche et des syndicats au salaire minimum jeunes est particulièrement violente dans notre pays. En décembre 1993 le gouvernement Balladur après en avoir adopté une version relativement plus favorable pour les intéressés (le CIP ou Contrat d’insertion professionnelle) avait dû faire marche arrière, face à un véritable soulèvement urbain. Depuis, plus aucun gouvernement n’ose reprendre la mesure.
D’après les opposants à la réduction du salaire minimum, il ne serait pas possible de vivre avec moins que le SMIC. Ils sont pourtant des millions d’adultes, qu’ils soient chômeurs ou étudiants, à y parvenir.
Comment font les moins de 25 ans qui ne gagnent pas le salaire minimum (en France ou ailleurs) pour vivre ? Dans de nombreux cas, ils logent chez leurs parents, leur salaire n’étant alors qu’un revenu d’appoint pour leurs familles. Dans d’autres cas, ils sont mariés et leurs conjoints perçoivent aussi des salaires. Plus généralement, ils sont dans des situations provisoires (les salaires minimum jeunes s’appréciant rapidement avec l’âge). Mais il y a tout de même des personnes contraintes de vivre avec cette faible rémunération. Ils seraient cependant moins nombreux que ceux qui aujourd’hui ne trouvent pas de travail et de ce fait n’ont aucun salaire du tout !
Car le problème est mal posé : les jeunes n’ont pas à choisir entre le SMIC standard ou un SMIC réduit mais entre un SMIC réduit et pas de salaire du tout ! Sans oublier qu’un jeune touchant un salaire minimum réduit bénéficierait dans l’entreprise, en plus de sa paye d’une formation et d’une expérience qui justifieront des salaires plus élevés dans la suite de sa carrière.
Florin Aftalion est professeur émérite à l’ESSEC et auteur de Le salaire minimum, Libréchange, 2014.