Les suppressions de poste et le recours aux contractuels sont incontournables vu la situation budgétaire
Interview publiée le 30 octobre dans Ouest-France.
Le gouvernement français propose de supprimer de 50 000 postes de fonctionnaires d’ici à 2022 et de développer les embauches en dehors du statut de fonctionnaires. Interview de Nicolas Marques, directeur général de l’IEM, par Patrice Moyon, chroniqueur économique et social, éditorialiste chez Ouest-France.
Le gouvernement veut supprimer 50 000 postes dans la fonction publique. Est-ce vraiment nécessaire ?
La France n’équilibre pas son budget depuis 1974. Ce qui signifie qu’elle règle ses dépenses de fonctionnement en s’endettant. Dans un contexte marqué par le ralentissement de la croissance et de remontée des taux, il est urgent de s’attaquer à ce dossier. Les dépenses liées aux rémunérations publiques représentent 13 % du PIB. La France est dans le quart supérieur en Europe dans ce domaine, assez proche de la Suède, de la Belgique ou la Grèce. Pour le Danemark, c’est 16 % du PIB mais 7,5 % en Allemagne, 9 % au Royaume-Uni et 10 % en Italie. Ne pas intervenir maintenant, c’est prendre le risque de devoir le faire dans l’urgence comme le Portugal ou la Grèce.
Emmanuel Macron se démarque de Nicolas Sarkozy. Il a raison ?
Oui. Lors de la dernière campagne présidentielle Nicolas Sarkozy avait proposé la suppression de 300 000 postes en ne remplaçant pas un départ à la retraite sur deux. Mais cette méthode présentait beaucoup d’inconvénients. Elle aurait été particulièrement douloureuse dans des secteurs vieillissants ayant besoin de sang neuf. Ce nouvel objectif me semble pragmatique, réaliste et conforme aux engagements du candidat Emmanuel Macron. 50 000 postes, ce n’est que 2,3% des effectifs de la fonction publique d’Etat et 1% du total des effectifs de la fonction publique.
Le développement de la contractualisation est une menace pour les services publics ?
La contractualisation existe déjà, y compris dans des domaines régaliens comme la Défense avec 65% de contractuels, essentiellement des soldats qui apportent à l’armée le renouvellement dont elle a besoin. On peut surtout espérer que cette réforme permette d’introduire plus de mobilité au sein même de la fonction publique. Enseigner, c’est un beau métier. Mais on peut aussi avoir envie d’évoluer, de faire autre chose après 10, 15 ans, soit au sein de la fonction publique, soit ailleurs.
Mais ce plan de départ volontaires peut justement faire partir des cadres dont la fonction publique a besoin.
C’est un risque effectivement. On le voit parfois avec des plans de départ volontaire dans le privé quand ceux qui étaient censés rester s’en vont. Mais si on réussit dans le même temps à attirer des talents, cette réforme aura été réussie.
Nicolas Marques est directeur de l’Institut économique Molinari.