Entreprises du CAC 40, une richesse partagée
Texte d’opinion publié le 19 mai 2019 dans Les Échos.
Seules les grandes entreprises étrangères sont plus impopulaires que les grandes entreprises en général. C’est l’une des raisons pour laquelle la taxe sur le numérique a reçu un bon accueil en dépit de sa contre-productivité annoncée. Dans ce contexte, expliquer que les chiffres montrent que le partage de la valeur des grandes entreprises françaises profite d’abord aux Etats et aux salariés peut sembler peine perdue. Pourtant c’est essentiel, car les entreprises, quelle que soit leur taille, sont devenues incontournables. La collectivité en attend beaucoup, voire peut être trop. Aussi il est utile, de temps à autre, de rappeler de façon factuelle ce que nous obtenons collectivement de nos entreprises.
De la loyauté à la détestation
Les entreprises produisent l’essentiel de l’emploi et des biens que nous consommons. Nous en sommes de plus en plus dépendants. Aussi, il est facile de ressentir à leur égard des sentiments allant de la loyauté ou de la sympathie à la haine et la détestation. Les sentiments négatifs sont devenus particulièrement présents au cours des dernières années. S’ils peuvent être compréhensibles et mêmes naturels, il est nécessaire de s’en départir lorsque nous pensons nos politiques publiques. A défaut, nous courons le risque de nuire au développement des entreprises qui constituent aujourd’hui nos principales sources de richesse.
En plus de nos salaires, primes, épargne salariale , nous finançons, à travers l’entreprise, nos assurances maladie, retraite, invalidité, congés parentaux, nos formations et parfois même la garde de nos enfants. On pourrait presque penser que c’est trop. Mais qu’on y pense, le capitalisme n’est pas si facile à remplacer . Si d’autres formes d’organisation non marchandes peuvent sembler plus sympathiques à première vue, elles n’améliorent pas nécessairement les compromis qu’il faut faire pour pouvoir subvenir à nos besoins.
Or, un certain « populisme économique » conduit de plus en plus à décrier les grands employeurs, en les accusant de tous les maux : ils ne partageraient pas les profits, ils privilégieraient les dividendes plus que les investissements, ce qui générerait un enrichissement anormal des actionnaires. Il est donc utile d’extérioriser la création de valeur pour la collectivité au sens large des grandes entreprises. Ainsi la dernière étude de l’Institut économique Molinari montre qu’en 2018, les entreprises du CAC 40 ont créé 373 milliards d’euros de richesse pour les collectivités française et mondiale. Ces 373 milliards d’euros ont généré 265 milliards d’euros de richesse pour les salariés (71 %), 72 milliards d’euros pour les Etats français (19 %) et étrangers et 36 milliards d’euros net (10 %) pour les actionnaires.
Si l’on se focalise sur le seul partage des résultats non réinvestis par les entreprises, soit 84 milliards d’euros, les Etats apparaissent comme les premiers bénéficiaires, suivis des actionnaires puis des salariés. Par rapport à la précédente édition, portant sur 2016, la contribution des entreprises du CAC 40 progresse de 10 %. Les Etats sont les premiers gagnants (+14 %), suivis des salariés (+10 %) et des actionnaires (+2 %). Cette dynamique s’explique par une évolution bien plus rapide de l’impôt sur les sociétés (+20 %).
Ces données fondées sur les documents de référence des entreprises permettent de mettre les choses en perspective. Les entreprises, fictions sociales au sens de Yuval Noah Harari , sont aussi des ciments indispensables de nos communautés.
Cécile Philippe est présidente de l’Institut économique Molinari.