2024FrançaisL'IEM dans les médias

La France toujours championne d’Europe de la pression fiscale

L'étude, annoncé en une, faisait l'objet d'un éditorial de Jacques-Olivier Martin et d'un article de Julie Ruiz Perez dans les pages économie du Figaro le 17 juillet

EXCLUSIF – Ce n’est qu’à partir du 17 juillet que les Français finissent symboliquement de payer les différents impôts et cotisations servant à financer les services publics et prestations collectives.

À quelques jours près, la date pourrait coïncider avec la fête nationale. Cela permettrait aux Français de célébrer en même temps leur glorieux héritage politique et leur lourd héritage fiscal. Cette année, comme l’an dernier, la France est championne de la pression fiscale et sociale, selon une étude de l’Institut économique Molinari (IEM). D’après les calculs de ces experts, les Français ne commenceront à travailler pour eux-mêmes qu’à partir de ce mercredi 17 juillet, « libérés » du poids des prélèvements obligatoires.

En clair, un salarié moyen (célibataire sans enfants, qui touche le salaire moyen) doit travailler jusqu’à cette date pour s’acquitter de l’ensemble des cotisations salariales et patronales, impôts et TVA nécessaires pour financer la dépense publique. « Cette date marque symboliquement le jour où le salarié est libre de faire ce qu’il veut de son argent », analyse le directeur général de l’Institut Molinari, Nicolas Marques.

Le jour de libération fiscale des Français est, comme l’année dernière, le plus tardif d’Europe, loin derrière celui des Anglais, « libérés » fiscalement le 1er mai, ou des Espagnols, le 10 juin. Sur le podium, à côté de l’Hexagone, se trouve la Belgique (15 juillet) et l’Autriche (12 juillet), cette dernière affichant un recul significatif (trois jours plus tôt que l’an passé) grâce à une baisse de l’impôt sur le revenu. La moyenne européenne est quant à elle en légère progression (11 juin cette année, contre 10 juin l’an passé), du fait notamment de l’inflation car « de nombreux pays n’ont pas de mécanisme de revalorisation automatique des tranches d’impôts sur le revenu », décrypte Nicolas Marques.

Même si le barème de l’impôt sur le revenu y a été aligné sur l’inflation, la France conserve sa place dans la liste de pays où les cotisations sociales et impôts sont plus élevés que le revenu disponible. Concrètement, selon les calculs de l’institut, un salarié doit payer 118 euros de cotisations et d’impôts pour « accéder » à 100 euros de pouvoir d’achat.

Pour autant, la pression fiscale n’est pas une mauvaise chose en soi, tempère Olivier Redoulès, directeur des études chez Rexecode. « En face de la pression fiscale, il y a des dépenses. Les Français payent beaucoup, mais il faut noter qu’ils reçoivent beaucoup. » Cet état de fait relève en réalité de « choix politiques successifs : avoir une retraite très généreuse, une assurance-chômage protectrice, un niveau d’intervention de l’État qui est plus élevé et étendu qu’ailleurs », souligne l’économiste. Le modèle d’éducation ou de santé coûte notamment beaucoup moins cher aux citoyens que dans de nombreux pays. Malgré tout, le haut niveau de dépense collective français ne semble pas associé à un supplément de bien-être significatif. Malgré toutes les prestations dont bénéficient ses habitants, l’indicateur de satisfaction dans la vie de l’Union européenne classe la France légèrement en dessous de la moyenne (7,3 sur 10). La satisfaction des Français ressort ainsi à 7,1 sur 10, au 21e rang sur 27. Dans l’Hexagone, « la tradition est de réduire les risques individuels en socialisant. C’est un choix, mais cela réduit également la liberté pour les particuliers d’investir, d’entreprendre, d’épargner. Moins de risques, c’est aussi moins de gains », décrypte Olivier Redoulès.

«Une illusion»

Le cas des retraites françaises est assez symbolique de ce modèle. Celles-ci représentent 23,6 % des dépenses publiques en France. Pour un salarié moyen, les cotisations retraites pèsent 28 % de son salaire brut. Pour autant, cela ne signifie pas que les Français bénéficient de meilleures pensions. La France se classe seulement 11e dans l’Union européenne vis-à-vis du taux de remplacement à la retraite (ratio entre le montant de la pension et le salaire moyen). « On constate que les pays qui ont une part de capitalisation dans leurs systèmes de retraites ont un meilleur rapport qualité-prix pour leurs cotisations », explique Nicolas Marques. Les salariés danois, par exemple, toucheront en moyenne 77 % de leur salaire à la retraite (contre 68 % pour la France), alors qu’ils cotisent à peine 13 % de leur salaire pendant leur carrière.

Au global, cette pression fiscale record pénalise « la compétitivité des entreprises et l’attractivité du territoire ainsi que le pouvoir d’achat des salariés moyens », analyse Nicolas Marques. « Le salarié moyen français coûte sur l’année 59 458 euros à son employeur (9e rang de l’UE). Mais son travail est si fiscalisé (54 %), qu’il ne lui reste que 27 326 euros nets de charges et d’impôts », note le rapport. Selon le rapport, « l’importance des cotisations sociales génère des tensions avec, d’une part, des employeurs inquiets de l’envolée du coût du travail depuis des années et, d’autre part, des salariés ayant parfois l’impression d’être mal rémunérés. (…) D’où l’impression que le travail ne paie pas assez, la récurrence des revendications liées au pouvoir d’achat », qui ont notamment beaucoup occupé le débat public pendant la campagne des législatives.

Contraintes budgétaires

Pour Nicolas Marques, même si les allégements de cotisations sociales mis en place par les gouvernements Macron ces dernières années vont dans le bon sens, elles sont loin d’être suffisantes. « Penser que les entreprises ont les moyens de corriger structurellement cette situation en modifiant le partage de la valeur ajoutée (réformée l’année dernière par le gouvernement, NDLR) est une illusion », tacle-t-il.

Pour rappel, le camp Macron est parvenu au cours de ces sept dernières années à réduire les impôts (pour les particuliers et pour les entreprises) de plus de 60 milliards d’euros. Le nouveau paysage politique laisse pourtant peu d’espoir de voir la pression fiscale se réduire à moyen terme. De fait, « les baisses d’impôts prévues par l’ancienne majorité, notamment celle de 2 milliards promise aux classes moyennes, sont mises entre parenthèses », admet-on au gouvernement. Les impôts pourraient même être significativement augmentés si le programme du Nouveau Front populaire – qui a obtenu une majorité relative à l’Assemblée – venait à être appliqué. Et même si le prochain gouvernement était d’une coloration plus centriste ou plus droitière, les contraintes budgétaires pourraient aussi mener à des hausses de fiscalité.

La Cour des comptes, qui a publié ce lundi son rapport sur la situation des finances publiques, estime que si la France veut passer son déficit sous la barre des 3 % de PIB, cela supposerait une hausse des prélèvements obligatoires de près de 21 milliards d’euros en 2025-2026. Ainsi, la trajectoire budgétaire actuelle intègre « des mesures de hausses d’impôts d’ampleur, à hauteur de 15 milliards d’euros en 2025 (0,5 point de PIB) et de 6,2 milliards d’euros en 2026 (0,2 point de PIB) », indique l’institution.

 

Nicolas Marques

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