Retraite: une généralisation de la capitalisation collective dans le privé, vite!
A ce stade, la France compte une dizaine de millions d’épargnants retraite pour une population active de 30 millions et la capitalisation retraite représente 5 % des cotisations retraites. Texte d’opinion par Cécile Philippe et Nicolas Marques, respectivement présidente et directeur général de l’Institut économique Molinari, publié dans l’Opinion.
Rattraper le retard français, en généralisant la capitalisation et, particulièrement, les capitalisations collectives, représente un enjeu collectif pour améliorer la compétitivité et le pouvoir d’achat, mieux financer l’économie, préserver la souveraineté, conforter le partage des profits, réduire les inégalités patrimoniales, soulager les finances publiques et mieux financer les priorités.
La capitalisation est déjà une réalité en France, mais elle est malheureusement sous-dimensionnée avec à peine 12 % du PIB placés, contre 89 % en moyenne dans les pays développés, soit un manque d’épargne retraite de 2 100 milliards dans l’Hexagone.
Complément. La capitalisation retraite individuelle ou d’entreprise représente plus de 260 milliards d’euros en 2022. Elle repose sur une démarche volontaire et s’est développée depuis les années 1960. En 1964, quatre syndicats ont créé la Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique (Préfon), ouverte aux fonctionnaires souhaitant constituer un complément retraite par capitalisation.
En 1994, les professions libérales ont obtenu la création des contrats Madelin. En 2003, la loi Fillon crée les Plans d’épargne retraite populaires (devenus PER individuels), ouverts à tous mais aussi les Perco (devenus PER collectifs). La loi Pacte de 2019 a harmonisé les produits existants.
Les capitalisations collectives sont, en revanche, sous-dimensionnées, avec à peine 66 milliards d’euros alors qu’elles sont de très belles réussites. Ainsi, l’Etablissement de retraite additionnelle de la fonction publique (ERAFP) a accumulé 43 milliards d’euros au profit de 4,5 millions de fonctionnaires depuis sa création. Géré paritairement avec les syndicats, ce fonds de pension obligatoire a dégagé un rendement de 4,2 % par an depuis sa création en 2005.
Autofinancement. La Banque de France a placé 14 milliards au profit de ses personnels et retraités, ce qui lui permet d’autofinancer une part significative des pensions sans faire appel aux contribuables et de restituer périodiquement des excédents significatifs à l’Etat (2,6 milliards
depuis 2020).
La Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) a placé 7 milliards d’euros au profit des pharmaciens, ce qui lui permet de distribuer des retraites attrayantes en dépit de la pyramide des âges très défavorable de cette profession réglementée
Le Sénat a placé 1,4 milliard au profit de ses personnels, élus et retraités, ce qui lui permet d’autofinancer 55 % des retraites qu’il verse sans faire appel aux contribuables, soit une économie de 13 % de ses dépenses de fonctionnement chaque année. La Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) a placé 7 milliards d’euros au profit des pharmaciens, ce qui lui permet de distribuer des retraites attrayantes en dépit de la pyramide des âges très défavorable de cette profession réglementée.
A cela s’ajoutent les réserves des régimes de retraite par répartition qui pesaient 206 milliards fin 2023. Là encore elles sont notoirement insuffisantes, avec à peine 7 % du PIB placés soit quatre fois moins qu’en Finlande ou qu’en Suède. Mais en dépit de leur sous-dimensionnement ces réserves apportent des recettes additionnelles. A lui seul, le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) crée un milliard de richesse par an en dépit de sa petite taille (21 milliards d’euros).
La France compte une dizaine de millions d’épargnants retraite pour une population active de 30 millions et la capitalisation retraite représente 5 % des cotisations retraites. L’enjeu est de rattraper le retard français, ce qui passe par la généralisation de la capitalisation collective dans le privé, à l’image de ce qui a été fait dans le secteur public en 2005 avec la création de l’ERAFP.