L’insoutenable légèreté fiscale française
Des discussions de comptoir au dîner en ville, le sujet des impôts passionne. Normal dans un pays champion de la fiscalité. Pour autant, il n’est pas sûr que notre perception collective soit à la hauteur des enjeux. Chronique de Nicolas Marques, directeur général de l’Institut économique Molinari, publiée sur Capital.fr.
Il y a quelques jours, le rapporteur général de la Commission des finances de l’Assemblée nationale annonçait vouloir s’attaquer aux niches fiscales « non évaluées ». Il s’agirait d’éradiquer des « trous noirs fiscaux » dont on ne sait pas à qui ils profitent. S’il est judicieux d’évaluer les dispositifs fiscaux, l’enjeu va bien au-delà des mesures dérogatoires qu’on qualifie parfois rapidement de « niches », en oubliant qu’elles ont pour la plupart été mises en place pour compenser la rigueur de notre système fiscal. L’évaluation de la fiscalité dans son ensemble est indispensable si l’on veut cesser de fonctionner « à l’aveugle », conformément à une recommandation récente de la Cour des comptes.
Nombre de nos concitoyens pensent que les sujets économiques fiscaux sont appréhendés avec la rigueur qu’ils méritent. Nous sommes dans un pays à forte tradition financière. Pendant des siècles la haute fonction publique française a produit des experts renommés en fiscalité et en finances publiques, tels Vauban, Turgot, Jèze ou Lauré. Pour autant, il est probable que cette qualité se soit érodée au fil du temps, l’analyse économique ayant été reléguée au second plan.
D’une part, le débat public est moins fécond en raison de la prégnance de concepts limitant la capacité de raisonnement. Un nombre significatif de poncifs, représentant autant d’œillères, limitent nos capacités à penser les enjeux fiscaux. Trop souvent la fiscalité est appréhendée de façon inutilement clivante, la tentation étant d’accuser les gouvernants de favoriser certains acteurs au détriment des autres, sans analyse préalable des effets économiques réels.