Covid-19 : pourquoi il est urgent de continuer à combattre la pandémie
386 experts du monde entier viennent de publier un article dans Nature invitant à poursuivre la lutte contre l’épidémie, une menace persistante pour la santé publique. Chronique par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publiée dans L’Express.
Près de trois ans après le début de la pandémie et la mise en oeuvre d’un nombre considérable de mesures – confinement, port du masque, vastes campagnes de vaccination – l’idée semble s’être progressivement imposée selon laquelle le Sars-CoV-2 ne constituait plus une menace trop sérieuse pour nos sociétés et nos économies. Cette vision est remise en question par des faits têtus qui s’imposent progressivement. En effet, tandis que le nombre de contaminations continue à progresser, les décès liés à la Covid poursuivent leur inexorable progression. Dans le même temps, le Covid long – à savoir les symptômes prolongés, fluctuants et multi-systémiques (respiratoires, cardiaques, neurologiques, vasculaires, dermatologiques, ORL, digestifs…) qui se développent puis persistent après une infection par le virus Sars-CoV-2 donne lieu à une abondante littérature. Ce phénomène pourrait prendre de l’ampleur et impacter gravement les marchés du travail s’il s’avérait que de nouvelles infections augmentent le risque de subir ces symptômes.
C’est pourquoi, en dépit du laissez-faire actuel à l’égard de la Covid, un consensus s’est fait entre 386 experts dans 112 pays pour poursuivre de manière coordonnée la lutte contre Sars-CoV-2. Convaincus des menaces que ce virus – et d’autres à venir – continue de faire courir sur les populations, ils proposent dans un article publié dans la revue Nature une série de recommandations susceptibles de recréer un environnement favorable aux interactions sociales auxquelles nous aspirons tous.
Nos sociétés dépendent de la division du travail et de l’extrême spécialisation de chacun d’entre nous. Si elles fonctionnent plus ou moins correctement, c’est parce que nous sommes reliés les uns et autres et sommes en mesure de mettre nos compétences au service des autres. Le virus, qui mute au gré de nos interactions, agit comme un frein aux interactions et à la confiance.
Amélioration de la qualité de l’air
C’est pourquoi, « vivre » avec la Covid signifie pour ces experts continuer à se mobiliser contre la pandémie, au niveau individuel et collectif. C’est en communiquant, en agissant et en coordonnant les différents niveaux d’action qu’il sera possible de minimiser les effets dommageables du virus. On sait aujourd’hui que la stratégie vaccinale déployée depuis le début de la pandémie – en dépit de l’exploit qu’elle a été – ne suffit pas car les vaccins ne bloquent pas les transmissions. Ils laissent le virus muter plus vite qu’il n’est possible d’adapter les vaccins.
L’erreur a été de penser que les vaccins suffisaient quand nous avions d’autres instruments à notre disposition. L’amélioration de la qualité de l’air est notamment un domaine qui mériterait d’être massivement développé tant elle pourrait améliorer la situation. Certains pays ont engagé de vastes plans d’investissement mais – comme le souligne le panel d’expert – le manque de coordination continue de poser problème. Pourtant, ce n’est pas la première fois que nos sociétés sont confrontées à des défis de grande ampleur.
Des mesures pour réduire le risque de transmission
Nos ancêtres ont eu à relever les défis, dans des villes de plus en plus peuplées, du captage, de la distribution et de l’évacuation de l’eau. La question des égouts dans les grandes villes européennes était au coeur des préoccupations dans la mesure où la mauvaise gestion des eaux usées a par le passé favorisé le développement d’épidémies de grande ampleur. Au XIXe siècle, de nombreuses villes européennes ont investi dans les tout-à-l’égout. La mise en place de réseaux d’assainissement modernes leur a permis de transporter et traiter les eaux usagées, pour résoudre les problèmes de pollution et de santé. Cette innovation s’avéra clef pour l’assainissement des villes et leur densification. Pour autant, le milieu médical, scientifique et certains lobbys sont restés à l’époque longtemps divisés sur l’intérêt de ces investissements massifs, comme c’est le cas aujourd’hui vis de Sars-CoV-2.
Or, les technologies sont disponibles qu’il s’agisse des filtres qui peuvent être installés dans les systèmes de chauffage, ventilation et climatisation ou les purificateurs portables munis de filtres HEPA. Ce sont des instruments puissants pour lutter contre les virus et au-delà, les allergies ou la pollution. Si leurs avantages font l’unanimité, nos décideurs restent trop timides ou hésitants à aller de l’avant pour favoriser leur mise en oeuvre.
D’autres mesures puissantes existent montrant clairement qu’elles réduisent le risque de transmission et donc les conséquences sanitaires à long terme. C’est pourquoi, cette déclaration de consensus arrive à point nommé pour proposer des mesures constructives visant à reconquérir une victoire du monde moderne, pouvoir vivre ensemble en minimisant les risques, en continuant à bénéficier pleinement de la proximité et de la spécialisation des uns et des autres.