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La réforme santé d’Obama: deux points de vue

L’article de Michael D. Tanner a été publié sur le site du National Review, le 20 mars 2010. Celui de Sally C. Pipes, dans le New York Post, le 22 mars 2010.

Notre future sous la réforme de santé d’Obama

par Michael D. Tanner*

(…) Le projet de loi coûtera plus cher que les chiffres annoncés. Il ne faudra pas longtemps au Congrès pour découvrir le pot aux roses, à savoir que la réforme sera bien plus chère que ce qui est annoncé. Cela ne tient pas seulement à l’utilisation de gadgets budgétaires utilisés par les Démocrates pour cacher le coût réel de la réforme. C’est aussi un fait que les programmes gouvernementaux en général, et ceux dans le domaine de la santé en particulier,, finissent toujours par excéder le coût initial prévu.

Par exemple, lorsque le programme social Medicare (couverture santé publique des personnes âgées de plus de 65 ans) a été institué en 1965, on estimait que la première partie de la réforme serait de 9 milliards de dollars en 1990. Il s’est avéré en réalité sept fois plus élevé – 67 milliards de dollars. De même, en 1987, la subvention exceptionnelle aux hôpitaux du programme Medicaid était évaluée à 100 millions de dollars par an jusqu’en 1992. Or, 5 ans plus tard, elle coûtait 11 milliards de dollars, soit plus de 100 fois plus. Et quand en 1988 furent établies les aides aux soins à domicile de Medicare, le coût estimé en 1993 était de 4 milliards de dollars alors qu’il fut en fait de 10 milliards de dollars.

Une fois qu’un «droit» acquis est en place, il devient pratiquement impossible de le supprimer. Les primes d’assurance ne cessent d’augmenter. Le Président a tenté de convaincre les gens que la réforme des soins de santé permettra de réduire leurs coûts d’assurance. Ils vont être surpris. Selon le Congressional Budget Office, les primes d’assurance doubleront dans les prochaines années. Le projet de loi n’atténuera pas cette augmentation. En fait, pour les millions d’Américains qui obtiennent leur assurance directement sur le marché plutôt que via leur employeur, ce projet augmentera les cotisations de 10-13 %. Les personnes jeunes et en bonne santé peuvent aussi s’attendre à voir leurs primes augmenter.

La qualité des soins va empirer. Les remboursements des médecins pour offrir des soins seront diminués, ce qui rendra inévitablement plus difficile de trouver un médecin. Une nouvelle enquête dans le New England Journal of Medecine rapporte que 46% des médecins pourraient renoncer à l’exercice de leur pratique du fait de cette réforme. Ce chiffre est sans doute exagéré mais souligne que de nombreux médecins pourraient décider de réduire leur nombre de patients ou prendre une retraite anticipée alors que dans le même temps, la demande continue d’augmenter créant ainsi des problèmes supplémentaires.

Dans le Massachusetts, après le passage de la réforme de la santé Romney, le délai d’attente pour consulter un généraliste est passé de 33 à 52 jours. La R&D sera également réduite, ce qui signifie qu’il y aura moins de nouveaux médicaments et autres innovations médicales. Du coup, le gouvernement interviendra de plus en plus, prenant des décisions médicales à tous les niveaux, décrétant quels sont les traitements les plus efficaces ou, pire, les plus économiques.

La gauche va continuer à en demander plus. Nancy Pelosi n’a-t-elle pas dit qu’« une fois la porte franchie, il y aurait de la place pour de nouvelles législations ». Face à la hausse des coûts et à l’augmentation des primes, sans parler des millions de personnes qui ne seront toujours pas assurées, les Démocrates pourront blâmer les compagnies d’assurance et réclamer des réformes supplémentaires. Ils diront tout simplement que leur réforme n’allait pas assez loin et qu’ils ont donc échoué. Pelosi ne pouvait plus maintenir le couvercle sur ce que la gauche dure s’est empêchée de dire jusqu’à maintenant, à savoir que cette réforme est la première étape idéale pour ensuite imposer un régime unique d’assurance maladie universelle.

Les Républicains n’essaieront pas vraiment de l’abroger. Les Républicains feront campagne cet automne avec la promesse de supprimer cette réforme hautement impopulaire. Cette impopularité représente pour eux un avantage important pour se faire élire. Mais en réalité, il y a peu de chances qu’ils essaient ensuite de revenir en arrière. Même si les Républicains arrivaient à contrôler les deux Chambres, ils continueront de faire face au véto présidentiel et à des obstructions systématiques des Démocrates.

(…) Le fait que les Républicains aient critiqué la reforme Obama pour avoir diminué le programme Medicare indique clairement qu’ils ne sont pas désireux de faire face à l’impopularité de diminuer les «droits» acquis de la population, même s’il devient difficile, voire impossible, de financer ces droits. Le fait que Paul Ryan a proposé un plan ambitieux en matière de réforme des droits, mais que seules 6 personnes ont décidé de le parrainer conjointement en dit long. (…)

* Michael Tanner est senior fellow au Cato Institute et coauteur de Healthy Competition: What’s Holding Back Health Care and How to Free It (Une saine concurrence: ce qui freine le système de santé et comment le libérer).


La réforme santé d’Obama (Obamacare) passe: la douleur commence

par Sally C. Pipes*

Avec l’adoption du projet de réforme de l’assurance maladie, le Président Obama, le porte-parole de la Chambre des représentants des États-Unis Nancy Pelosi et le chef de la majorité au Sénat Harry Reid, ont veillé à ce que l’économie américaine et la situation des ménages passent par une décennie agitée.
(…)
Non seulement, [le projet de réforme] n’assure pas une assurance maladie universelle, mais il pousse les coûts de santé à la hausse, et non à la baisse.

Il élargit le programme social Medicaid, coupe dans le programme Medicare et ajoute des milliards de dollars en nouvelles taxes et dispositions de couverture maladie obligatoires, alors que ces ressources sont nécessaires pour réduire le chômage des Américains.

Le résultat immédiat du vote n’est en fait pas grand-chose. Les Américains prévoient déjà une année difficile l’an prochain dans la mesure où les réductions fiscales de Bush expirent et vont donc entraîner des milliards de dollars de prélèvements supplémentaires pour le secteur privé. Les conséquences fiscales du plan d’assurance maladie obligatoire d’Obama seront plus tardives. L’augmentation des coûts de santé pour les entreprises et les ménages n’entraîneront une hausse des taxes que dans les années à venir.

Cela ne veut cependant pas dire qu’il n’y aura pas d’effets à court terme. En effet, le projet de loi repousse immédiatement à 26 ans l’âge limite de la catégorie des « jeunes », exigeant que les plans de santé collectifs et individuels couvrent des « enfants » adultes jusqu’à cet âge. Cela augmentera certainement les primes d’assurance. (…)

Les Américains vont également commencer à sentir en partie l’effet des 20 milliards de dollars de taxes imposées aux entreprises fabricants des appareils médicaux, ainsi qu’aux laboratoires pharmaceutiques. De plus, [les Américains] ne seront plus autorisés à acheter les médicaments en vente libre avec [leurs] comptes crédit-santé[[Ndt : il s’agit d’une forme de comptes d’épargne-santé défiscalisés aux États-Unis qui sont utilisés pour couvrir des frais de santé.]].

La partie fiscale la plus lourde de la réforme n’entrera en vigueur qu’en 2013. Les familles ayant un revenu supérieur à 250 000 $ paieront des cotisations obligatoires Medicare plus élevées, allant jusqu’à 2,35%, sans compter un nouveau prélèvement de 3,8% sur les intérêts et dividendes perçus. (…)

Le Congrès diminue radicalement – de 5000 $ à 2500 $ – le plafond des versements individuels annuels autorisés aux comptes crédit-santé. Il limite aussi les déductions fiscales pour les frais de santé en cas de maladie grave. Ces deux changements promettent un avenir difficile aux familles qui doivent faire face à des affections chroniques coûteuses. La moitié de ceux qui tirent avantage de cette déduction de frais médicaux gagne moins de 50 000 $ par an.

En 2014, le marché de l’assurance maladie risque d’être en plein désarroi. C’est l’année où les assureurs devront offrir les mêmes polices à tout le monde – faisant payer les mêmes primes aux assurés en bonne santé qu’aux personnes qui attendent de tomber malades avant de s’assurer.

Cette réforme a dévasté le marché d’assurance maladie de chaque Etat américain qui l’a déjà adoptée – entraînant de telles hausses de primes que plus de la moitié des particuliers et participants à de petits plans de santé collectifs ont complètement abandonné leur couverture maladie. Ces gens n’auront plus d’autre choix que de s’adresser au « Insurance Exchange » (système public proposant des plans de couverture maladie agrées, ndt), créé et subventionné par le gouvernement fédéral.

Pendant ce temps, des amendes de 2 000 $ par employé frapperont les entreprises comptant 50 travailleurs ou plus, si l’une d’entre elles a reçu des subventions fédérales.

À partir de 2018, les plans santé « haut de gamme » seront soumis à l’impôt, à savoir les plans individuels de plus de 10 200 $ par an et les plans familiaux supérieurs à 27 500 $. Étant donné la façon dont les barèmes de l’impôt sont indexés cela risque avec le temps d’inclure de plus en plus d’Américains, à l’image de ce qui s’est passé avec l’Alternative Minimum Tax sur le revenu, d’abord payé par les individus super riches, mais frappant actuellement des millions de personnes de la classe moyenne.

Les amendes prévues pour le non respect de l’obligation de s’assurer sont ridiculement basses, soit 0,5% du revenu en 2014 et un maximum de 2% en 2016. Beaucoup d’Américains pourraient avoir intérêt à duper le système en payant l’amende tant que leur santé est bonne et le jour où un pépin surviendra rien ne les empêchera d’acheter à ce moment là une assurance aux tarifs garantis par l’État comme s’ils étaient en bonne santé.

Il ressort clairement des sondages que 56% des Américains ne veulent pas que le gouvernement prenne le contrôle de leur système de santé. Mais Obama, Pelosi et Reid s’en moquent: ils croient que le gouvernement doit intervenir davantage et qu’il est mieux placé que les individus pour décider de la façon dont ils doivent gérer leurs propres vies.

Il ne fait aucun doute que cette réforme entraînera une hausse des impôts de tous les Américains, que le déficit se creusera, que leurs soins seront rationnés et qu’ils devront vivre sous un système étatique de « Medicaid pour tous ».

* Sally Pipes est président et directeur général du Pacific Research Institute. Son dernier livre s’intitule The Top Ten Myths of American Health Care.

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