Le nucléaire français a évité 25 années d’émissions de CO2 de 2022
Cette semaine, nous avons lancé avec Le Point une étude inédite de Georges Sapy sur le nucléaire français. Depuis son introduction, il a permis de fournir de l’électricité en évitant 25 fois les émissions de gaz à effet de serre de 2022. Cette énergie est clef pour la compétitivité économique dans une France qui cumule de nombreux handicaps, avec des prélèvements et réglementations excessifs. Le nucléaire est moins émetteur de gaz à effet de serre que les énergies fossiles, mais aussi moins consommateur d’espace que les énergies intermittentes et, surtout, bien moins aléatoire que le solaire ou l’éolien. Il a été de façon inconsidérée mis à l’index trop longtemps, ce qui constitue une erreur économique mais aussi sociale.
Ci-dessous l’article rédigé par Géraldine Woessner du Point dans le cadre du lancement de l’étude de l’Institut.
Alors que l’énergie nucléaire fait un retour en force dans le monde, l’institut Molinari a calculé ses avantages cumulés dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Au lendemain d’une COP28 ayant officiellement reconnu, pour la première fois, le rôle prépondérant que devront jouer toutes les sources d’énergie décarbonées dans la lutte contre le réchauffement climatique, les États les plus volontaires entendent pousser leur avantage, sur deux fronts essentiels.
L’accès aux financements, d’abord : de nombreux dispositifs européens d’aide à la transition énergétique excluent encore le nucléaire, parfois explicitement.
La philosophie des politiques conduites, ensuite : aujourd’hui, dans le cadre du Green Deal européen, l’Europe s’est fixé l’objectif contraignant d’atteindre une part d’ENR dans son mix électrique d’au minimum 42,5 % en 2030, contre 32 % aujourd’hui. Mais « les États membres qui ont déjà une électricité très décarbonée grâce au nucléaire ne peuvent pas intégrer indéfiniment des renouvelables », explique le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, déterminé à mettre sur le tapis cette aberration : la France, avec un mix électrique de 56 grammes de CO2 par kilowattheure produit en 2022, est sommée de faire les mêmes efforts de déploiement de renouvelables que l’Allemagne, dont le mix électrique émettait la même année 434 g CO2 éq /kWh, selon l’Agence fédérale de l´environnement… Soit huit fois plus !
« Nous devons nous poser la question des objectifs nationaux du paquet législatif Fit for 55, et les répartir équitablement », décrypte une source ministérielle. « Nous proposons une nouvelle directive « bas carbone », qui fixerait des objectifs non pas en termes de part de renouvelables, mais en part d’énergie décarbonée. »
Vingt-cinq années d’émissions de CO2 évitées en France
Un impératif dicté par l’efficacité : dans une étude à paraître, que Le Point a pu consulter, l’institut Molinari, un think tank libéral, calcule que le remplacement des énergies fossiles par le parc nucléaire français a permis à la France d’éviter, depuis 45 ans, environ 25 fois ses émissions en 2022.
Établie sur la base d’une production nette cumulée des réacteurs nucléaires français de 14 200 TWh depuis leur mise en service jusqu’à ce jour, et d’un mix alternatif au nucléaire qui aurait émis 752 gr de CO2 de plus par kWh, l’économie d’émissions liées au nucléaire par rapport au mix alternatif représenterait 10 700 millions de tonnes d’équivalent CO2 depuis le début de la commercialisation de l’électricité nucléaire, soit plus de 25 fois les émissions totales nationales de 2022 (403,8 millions de tonnes éq. CO2).
« L’apport climatique de notre parc nucléaire, depuis qu’il fonctionne, a été totalement occulté », argumente son auteur Georges Sapy, ancien ingénieur chez EDF. « Il est nécessaire d’objectiver ces apports, car si les pouvoirs publics en France en ont enfin pris conscience, ce n’est pas toujours le cas dans la population, qui était encore persuadée il y a deux ans que le nucléaire était une source importante d’émissions. »
Avec 4 gr éq. CO2/kWh pourtant (liés à la construction de la centrale, à son entretien et à son démantèlement), le nucléaire émet 3 à 4 fois moins que l’éolien et 8 à 11 fois moins que le photovoltaïque, documente le Giec. « Un parc éolien terrestre exige également, pour la même quantité d’électricité produite, une empreinte au sol 400 fois plus importante, et le facteur atteint 80 pour un parc photovoltaïque », insiste le spécialiste.
Des calculs confirmés par l’Agence de l’énergie atomique, qui estimait en 2018 que le nucléaire avait permis d’éviter, dans le monde, cinq années d’émissions totales du secteur électrique. À quelques mois des élections européennes, le débat devrait largement animer les meetings.