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Le nucléaire n’est pas sorti d’affaire

La nouvelle Commission européenne a confié la transition énergétique à deux personnalités opposées au nucléaire. Une mauvaise nouvelle pour la France. Chronique par Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, publiée dans Les Échos.

Alors que le nucléaire connaît un regain d’enthousiasme au sein d’une partie de l’opinion publique et parmi de grands acteurs comme les sociétés Amazon, Google et Microsoft qui y investissent des milliards pour alimenter leurs datacenters en limitant les émissions de CO2, la nouvelle Commission européenne comprend deux représentants notoirement opposés à l’énergie nucléaire à des postes clés en ce qui concerne l’énergie. Il va sans dire que cela va compliquer les choses pour le développement d’une énergie pourtant cruciale au mix énergétique, d’autant plus que le nucléaire français n’est pas sorti d’affaire.

L’Union européenne a une nouvelle Commission depuis fin novembre. En charge d’une transition propre, juste et compétitive et de la politique énergétique et des questions nucléaires, l’espagnole Teresa Rivera et le danois Dan Jorgensen sont des opposants de longue date à l’énergie nucléaire. L’Espagne persiste d’ailleurs dans son choix de sortir progressivement du nucléaire d’ici 2035 avec une première fermeture en 2027. Ces nominations ne sont pas de bonnes nouvelles concernant l’inclusion et le traitement neutre à l‘égard du nucléaire au sein du mix énergétique. Rappelons que le nucléaire est gagnant sur le plan environnemental. En effet, en 45 ans, le nucléaire en France a permis d’éviter l’équivalent de 25 fois les émissions totales de CO2 de 2022. L’Allemagne, à l’inverse, a dû recourir à davantage d’énergies fossiles pour compenser la fin du nucléaire. Par ailleurs, c’est un atout en matière d’indépendance énergétique et c’est une énergie facile à piloter en grande quantité.

Il est, par conséquent légitime, que cette énergie soit traitée de la même façon que les autres énergies vertes au niveau européen, notamment parce que c’est l’énergie qui émet le moins de CO2 par kWh produit. Avec 4 grammes d’émissions d’équivalent CO2 au kWh (liées à la construction de la centrale, à son entretien et à son démantèlement en fin de vie), le nucléaire émet 3 à 4 fois moins que l’éolien et 8 à 11 fois moins que le photovoltaïque). Il s’avère que des avancées ont été réalisées pour les nouvelles installations nucléaires dont les petits réacteurs modulaires (SMR) qui seront traitées en matière réglementaire comme les autres énergies renouvelables. Tel n’est pas le cas des anciennes installations qui en France sont nombreuses et assureront la plus grande partie de la production de l’énergie des prochaines décennies. Pour bénéficier des Contrats pour la différence (CFD), clefs pour donner de la visibilité tarifaire, elles doivent obtenir autorisation de la direction de la concurrence à Bruxelles, ce qui outre la charge administrative, soumet l’avenir des installations françaises à un jeu politique à l’issue incertaine.

Ce n’est pas le seul obstacle auquel fait face l’industrie du nucléaire. S’il semble acquis que les installations pourront être prolongées jusqu’à au moins 60 ans voire 80 ans, comme aux Etats-Unis (l’accident de Fukushima ayant encore favorisé une série d’améliorations en matière de sécurité, selon l’expert George Sapy), le financement des 6 prochains EPR2 n’a pas été approuvé par le gouvernement qui vient de tomber. Dans un contexte politique très incertain, les besoins à long terme en matière énergétique – comme dans bien d’autres domaines – risquent de passer au second plan. C’est pourtant là que nos dirigeants doivent être stratèges et vigilants.

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