Une Union Européenne tâtillone: la facturation du roaming GSM
Traduction par Frédéric Wauters d’un article publié par EU Reporter le 24 avril 2006.
Il paraît que les consommateurs paient trop cher l’utilisation de leur téléphone portable hors de leur pays de résidence. Pour mettre fin à cette situation, Viviane Reding, Commissaire Européenne à la Société de l’Information et aux Média, a décidé de réduire le prix que les opérateurs de réseaux de téléphonie mobile peuvent exiger auprès de leurs clients.
Il paraît que les consommateurs paient trop cher l’utilisation de leur téléphone portable hors de leur pays de résidence. Pour reprendre les mots de la parlementaire européenne libérale-démocrate Sharon Bowles, « Le coût exorbitant de l’émission ou de la réception d’appels sur un téléphone portable à l’étranger a vidé les poches du consommateur pendant trop longtemps. » Pour mettre fin à cette situation, Viviane Reding, Commissaire Européenne à la Société de l’Information et aux Média, a décidé de réduire le prix que les opérateurs de réseaux de téléphonie mobile peuvent exiger auprès de leurs clients. Cette nouvelle réglementation peut sembler séduisante pour le grand public, mais il ne fait aucun doute que le plafonnement du prix des appels longue-distance créera en fait une pénurie dans la fourniture de tels services, et réduira donc la satisfaction de certains consommateurs.
La croyance selon laquelle le contrôle des prix est un outil efficace pour imposer une réduction des coûts est profondément ancrée dans les esprits. Mais elle n’est pas fondée. En fait, lorsque le législateur impose un prix maximum au-delà duquel toute vente devient illégale, la quantité demandée correspondant à ce nouveau prix devient supérieure à la quantité offerte. L’imposition d’un prix maximum crée ainsi une « file d’attente », une pénurie artificielle du service en question, qui subsistera aussi longtemps que le prix maximum restera d’application.
Les contrôles des prix illustrent la mauvaise compréhension des règles de l’économie. Ils sont en général imposés en partant du principe que le prix du marché est trop élevé par rapport au coût réel du produit ou du service. Par exemple, Mme Bowles, la parlementaire européenne, a déclaré : « le coût plus élevé du traitement des « facturations internationales » est un mythe, et c’est un scandale que les opérateurs de téléphonie mobile aient pu rester impunis aussi longtemps. »
Ce qu’on ne réalise pas à la Commission Européenne, c’est que cette situation de haute profitabilité du roaming international ne pourrait être que temporaire si aucune autre réglementation étatique, par exemple l’obligation pour les opérateurs d’obtenir une licence, ne venait bloquer l’entrée sur le marché de la téléphonie mobile. Dans un marché libre, en effet, les bénéfices élevés de l’activité attireraient d’autres sociétés, actives par exemple dans des secteurs voisins où les marges bénéficiaires sont plus faibles. La perspective de bénéfices plus importants les inciterait à modifier leur production et à répondre ainsi à la demande. En pénétrant le marché à la recherche de profits plus élevés, ces sociétés augmenteraient l’offre disponible et entraîneraient une baisse des prix.
L’existence de bénéfices n’est pas donc suffisante pour conclure qu’il y a un problème sur le marché. Ils sont une caractéristique naturelle et efficace (pour attirer de nouveaux producteurs) du marché. Avant de tirer quelque conclusion que ce soit au sujet de possibles profits « injustifiés », il convient donc de s’informer d’avantage et de vérifier si les opérateurs mobiles bénéficient de privilèges accordés par l’État qui leur permettent d’exclure du marché de nouveaux concurrents potentiels. Si tel est le cas, le meilleur moyen de mettre fin à ces profits « artificiels » est d’éliminer ces barrières légales à l’entrée, pas d’imposer un contrôle des prix.
Si la Commission Européenne persiste dans son idée d’imposer un prix maximum pour la fourniture d’appels téléphoniques mobiles internationaux, cela contribuera uniquement à rendre cette activité moins attractive. Les opérateurs de téléphonie mobile transféreront leurs ressources vers la fourniture et la vente d’autres produits et services, et ce transfert se fera au détriment des mêmes consommateurs que la Commission voulait protéger.
Les bénéfices et les pertes sont la boussole qui permet de réorienter les ressources disponibles des activités auxquelles le public accorde moins de valeur vers les activités auxquelles il accorde plus de valeur. Les autorités ne disposent d’aucun outil plus performant pour transférer les ressources là où elles sont le plus demandées. Lorsqu’elles réglementent le marché, elles détruisent la base sur laquelle les entrepreneurs opèrent. Elles détruisent l’ajustement qui aurait pu avoir lieu et entraînent ainsi une mauvaise allocation des ressources qui réduit la satisfaction des consommateurs. La seule manière dont les autorités peuvent aider le marché à fonctionner correctement est de supprimer les barrières légales qui entravent la libre concurrence.
Cécile Philippe, Directeur Institut Economique Molinari et fellow au Centre for the New Europe